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La joie de vivre Il semble que les Tunisiens s’inquiètent pour leur sécurité et celle de leur famille. C’est du moins ce que révèle un sondage réalisé récemment (entre le 25 et le 28 mars) par le cabinet Tunisie Sondage, filiale de la société TBC Partners. 81% des sondés ont exprimé ce sentiment. Ils estiment que la hausse de la criminalité s’explique par le sentiment d’impunité qu’éprouvent les criminels vu l’insécurité et la lenteur de la justice, la grâce des détenus et le retard dans la rédaction de la Constitution. Ce n’est visiblement pas l’avis de Mme Meherzia Laâbidi, vice-présidente de l’ANC, qui, rejoignant l’avis du salafiste Hizb Ettahrir, pense que «ce sont les ennemis de la Révolution et ceux qui veulent la faire échouer qui sont derrière les vagues de viols, des agressions à l’encontre des politiciens et des profanations des tombeaux des saints en Tunisie». Pourtant, les enquêtes policières ont établi qu’un grand nombre de ces crimes ont été commis par des brigands récemment graciés. Elle n’est pas la seule responsable, représentant tout le peuple, à lancer ce genre de déclarations incompréhensibles. Le président de la République provisoire et le président de l’ANC s’adressent aux médias arabes pour attaquer et insulter l’opposition tunisienne et lui attribuer tous les maux. Ces mêmes responsables changent de discours quand ils s’adressent à des médias occidentaux et parlent de démocratie, de libertés, de consensus, d’ouverture. Avec les dictatures du Golfe, ils s’en prennent à l’opposition, flattant les islamistes et eux-mêmes, parlant ainsi le langage de la dictature. Des propos d’irresponsables, créant le pessimisme et la désunion. Les Tunisiens ne suivent pas, gardent le sens des réalités et expriment toujours leur joie de vivre. Même lorsqu’ils manifestent pour s’exprimer sur un sujet sérieux, ils le font avec une teinte d’humour, de dérision. Ainsi, les milliers qui voulaient crier leur désapprobation pour le comportement inqualifiable de la ministre de la femme, suite au viol d’une fillette, ont choisi de lancer devant son ministère des chaussures, en référence au goût exprimé par la ministre pour les chaussures de Leïla Ben Ali et aussi pour l’inviter à «dégager». Sur la couverture du nouveau livre, Les Tunisiens de notre confrère et ami Tahar Fazaâ, on peut lire... «Souriez, vous êtes en Tunisie, le pays de la joie permanente». Il s’en donne à cœur joie, croquant ses compatriotes avec ironie, dérision et humour et avec une note de tendresse et de complaisance. C’est que même dans la morosité et l’incertitude qui sévissent ces temps-ci, les Tunisiens restent optimistes et résolument désireux de s’en sortir et de vivre. On l’a vu à maintes reprises à l’occasion de ce Forum social mondial auquel les représentants de la société civile et d’autres ont fortement participé, multipliant les interventions, les propositions et ont manifesté leur goût de la vie, en chantant, en dansant, en rigolant. Il est significatif que parmi les activités prévues, le Campus universitaire de Tunis ait proposé un atelier de discussion autour du thème «Créer c’est résister, résister c’est créer». Et créer, les Tunisiens savent le faire et ils ne cessent de le faire et de se distinguer, même (et surtout) en l’absence des gouvernants, trop occupés à dénigrer et à s’octroyer des «butins». Ainsi, tout récemment, une jeune Tunisienne de 28 ans, Hajer, a, à Paris, soutenu brillamment une thèse de doctorat en chimie organique traitant d’un sujet très pointu. Le jury, composé de plusieurs éminents disciples de prix Nobel, a fortement apprécié la performance de l’avancée scientifique accomplie par la jeune Tunisienne, qui, par ailleurs, a reçu plusieurs propositions pour des contrats de recherche et des postes d’enseignement en Europe et en Amérique du Nord. A noter que pas un seul officiel tunisien n’était présent. Une autre jeune Tunisienne, Hayet Omri, a remporté la médaille d’or des Olympiades jeunes inventeurs de l’Université américaine Barry University. La chercheuse et professeure Selima Ben Mrad a remporté le «prix de la volontaire de l’année», octroyé par le Lycée franco-américain international, à Cooper City. Des dizaines d’autres chercheurs et chercheuses tunisiens travaillent en Tunisie et à l’étranger, obtenant des résultats d’un grand intérêt et sont salués...dans le silence de nos officiels. Et la joie de vivre est présente dans la multitude de manifestations socioculturelles et économiques qui sont organisées chaque jour à travers la République et même à l’étranger par diverses organisations. Il y a eu les Journées du cinéma des droits et libertés qui avaient commencé à Thala et au Kef pour être clôturées à Tunis. On pourrait aussi citer la «Soirée Poésie Jazz», au Palais Ennejma Ezzahra, le «Boat Expo», le Salon tunisien de la plaisance et de la croisière, le concours «Miss Tuning Tunisie» dont le casting a commencé à Sfax, le «Salon de l’image et du son», «le Festival national de l’image numérique», «le Tun Art Day», les rendez-vous culturels tunisiens qui ont commencé à Paris le 17 mars et se prolongeront jusqu’au 26 mai ; et bien d’autres projections cinématographiques, des pièces de théâtre, des expositions... Comme quoi, la vie est plus forte que la mort, n’en déplaise aux adeptes de la mort, des niqabs, des barbes hirsutes, des harams, des interdits, de la pensée unique...et de la désunion.
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